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BRISSON


lois constitutionnelles et les lois morales sont violées… Le département de la Guerre n’est plus qu’un fauteur d’anarchie, de la pire anarchie, celle qui vient d’en haut[1]. »

Tout cela en vingt-quatre heures. Encore à la dernière heure, il eût suffi d’un geste pour faire rentrer les factieux dans l’ordre. Et, maintenant, que faire ? Laisser faire…

XI

Drumont et Rochefort, informés en même temps que Brisson, lancèrent aussitôt la nouvelle : que le ministre de la Guerre avait « exigé » les poursuites contre Picquart et que « le vieux fourbe (Brisson) avait dû céder ».

Ce matin-là, si l’on pouvait tuer la Vérité, elle eût été morte. Du Lac eût été dans l’affaire (qui fut combinée, d’ailleurs, selon les meilleures règles de la Compagnie) que les raisonnements des revisionnistes, depuis un mois, sur le faux d’Henry, n’auraient pas été retournés contre eux avec plus de force. Picquart faussaire, c’est « l’effondrement de la Revision ». Maintenant, il importe peu qu’Esterhazy, « au comble de la gêne », accepte les cadeaux des juifs et se déclare l’auteur du bordereau, « Si, pour innocenter Dreyfus, on inventait des preuves contre Esterhazy, c’est qu’on n’en avait pas. » Chanoine, « Ganelon » d’hier, passe à son tour « loyal soldat ». « C’est la plus belle page de sa carrière militaire[2].

  1. Siècle des 31 août et 7 septembre 1903.
  2. Libre Parole et Intransigeant du 21 septembre 1898.