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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/126

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du vieux temps

provoquer par leur habileté à prendre une mine hypocrite et nécessiteuse,

Moitié gueusant, moitié maraudant, ils atteignaient enfin le but de leur voyage, non sans s’être attiré, sur la route, bon nombre de malédictions. Aussi disait-on proverbialement alors en France, que les grands gueux allaient à Saint-Jacquesen-Galicé, et que les petits allaient à Saint-Michel-en-Mer.

À leur retour, nos Michelets berrichons s’arrêtaient à Montgivray et y passaient la nuit. Le lendemain, le clergé de la Châtre venait les y chercher avec le même cérémonial qu’au départ, et les conduisait immédiatement à la chapelle de Vaudouan, en les faisant passer, à la Châtre, par le faubourg de la Grand-Font[1], où, sans doute, s’accomplissait, près de la fontaine du même nom, quelque pieuse cérémonie.

Arrivé à Vaudouan, on y célébrait une messe d’actions de grâces durant laquelle les jeunes pèlerins offraient à la Reine des anges une couronne d’argent, qu’ils ne manquaient jamais de rapporter de leur lointaine excursion. Cette gracieuse offrande se répétait si exactement et depuis tant d’années, que malgré les pillages auxquels la chapelle avait été plus d’une fois en butte, le nombre des couronnes données à la Vierge, montait, du temps du chroniqueur Villebanois, à plus de deux cents. À l’époque où M. Bourdeau de Fontenay écrivait, un demi-siècle plus tard, en 1731, une autre Histoire de Vaudouan, les couronnes d’argent s’étaient changées en couronnes de plomb ; ce qui semble dénoter un refroidissement dans la dévotion de nos jeunes Michelets. — « On aperçoit encore dans la chapelle, dit M. Bourdeau, quelques banderoles de coquillages avec des couronnes de plomb que les jeunes gens

  1. La fontaine de la Grand-Font, qui donne son nom à ce faubourg, abrite, sous sa voûte, construite en forme de chapelle, une image de la Vierge, devant laquelle on fait brûler des chandelles pour la délivrance des femmes en travail d’enfant. (Voy. les Esquisses pittoresques de l’Indre, p. 83.)