Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/509

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droit dont les côtés sont 2, ou dont un côté est 2 et l’autre 4. On sait au moins que V8 approche fort de 3, et que V20 est environ 4 et 1/2 ; et l’on peut, par certaines règles, approcher toujours à l’infini de leur véritable grandeur ; et si l’on ne peut y arriver, c’est que l’esprit ne peut comprendre l’infini. Mais on n’a qu’une idée fort confuse de la grandeur des soutendues, et on est même obligé de recourir à V8 ou V20 pour les exprimer. Ainsi, les constructions géométriques, dont on se sert pour exprimer les valeurs des quantités inconnues, ne sont pas si utiles à régler l’esprit et à découvrir les rapports ou les vérités que l’on cherche qu’a régler l’imagination. Mais comme l’on se plaît beaucoup plus à faire usage de son imagination que de son esprit, les mathématiciens ont d’ordinaire plus d’estime pour la géométrie que pour l’arithmétique et pour l’algèbre.

Pour faire parfaitement comprendre que l’arithmétique et l’algèbre sont ensemble la véritable logique qui sert à découvrir la vérité, et à donner à l’esprit toute l’étendue dont il est capable, il suffit de faire quelques réflexions sur les règles de ces sciences. On vient de dire que toutes les vérités ne sont que des rapports ; que le plus simple et le mieux connu de tous les rapports est celui d’égaIité ; qu’il est le commencement d’où il faut mesurer les autres pour avoir une idée de l’inégalité ; que la mesure dont on est obligé de se servir est l’unité ; et qu’il faut l'ajouter ou l'ôter autant de fois qu’il est nécessaire pour mesurer l’excès ou le défaut de l'inégalité de ces grandeurs ;

De là il est clair que toutes les opérations qui peuvent servir à découvrir les rapports d’égalité ne sont que des additions et des soustractions : additions de grandeurs pour égaler des grandeurs, additions de rapports pour égaler des rapports, ou pour mettre les grandeurs en proportion ; enfin addition de rapports de rapports pour égaler des rapports de rapports, ou pour mettre les grandeur s’en proportion composée.

Pour égaler 4 avec 2, il n’y a qu’à ajouter 2 avec 2, ou retrancher 2 de 4, ou enfin ajouter l’unité à 2 et la retrancher de 4. Cela est clair.

Pour égaler le rapport ou la raison de 8 à 2 au rapport de 6 a 3, il ne faut pas ajouter 3 à 2 ou retrancher 3 de 8, en sorte que l’excès d’un nombre à l’autre soit égal à 3, qui est l’excès de 6 sur 3 ; ce ne serait qu’ajouter et qu’égaler des grandeurs simples, l’excès de 8 sur 5 à celui de 6 sur 3. Il faut chercher d’abord la grandeur du rapport de 8 à 2, ou ce que vaut 8/2 et l’on trouve en divisant 8 par 2 que l’exposant de ce rapport est 4, ou que 8/2 est égal à 4.