Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/114

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ainsi, que ce qui n’est pour vous qu’une idée plaisante redevienne tout à coup un spectacle véritable. À pareille épreuve, resteriez-vous là à vous gausser des façons maladroites ou brutales que met un homme, en ce cas, pour en venir à ses fins ? Et c’est cependant ce qui vous amuse en cet instant ! Vous imaginez monsieur Le Varlon de Verrigny en une posture dont vous ne supporteriez pas l’odieux, si vous en étiez témoins. Je vous vois tous les deux courir au secours de la victime ! Et n’est-ce point d’ailleurs ce que vous avez fait, vous, monsieur de Bréot ? Mais voici bien l’esprit de l’homme ! Il est faible et ne retient qu’assez mal les impressions qu’il a reçues. Les plus fortes même ne tardent point à diminuer. Il y a une distance où elles prennent un aspect bien différent de ce qu’elles nous semblaient, et le souvenir que nous en gardons n’est point pareil à celui que nous en devrions avoir, si notre mémoire conservait exactement ce que nos yeux ont aperçu. N’en est-il pas un peu de même dans la facilité que nous montrons à nous pardonner certaines actions qui nous paraîtraient, sans aucun doute, indignes de nous, si l’éloignement où notre indifférence se hâte de les reléguer ne substituait à leur figure véritable