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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/126

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indispensable la personne qui est son objet. C’est pourquoi il nous crée des nécessités étranges. Qui songerait à s’offenser de ses redoutables exigences ? Aussi, comme je disais, la ruse et la force mais encore le rapt le plus hardi et les perfidies les plus délicates deviennent, du coup, presque agréés de tous, pourvu qu’ils soient au service de l’amour. Tout le monde est de cet avis, car chacun sait à quelles extrémités de désespoir et de douleur conduit la privation de qui l’on aime ; tellement que, si quelqu’un me disait qu’il éprouve un de ces sentiments irrémédiables je lui conseillerais de ne reculer devant aucun forfait plutôt que de s’exposer à conserver en son cœur un de ces regrets qui font, de n’avoir pas baisé une bouche ou touché un petit endroit de chair, le poison de notre vie et qui corrompt en nous la source même du bonheur.

M. de Bréot, en entendant M. Herbou parler ainsi, rougit encore parce qu’il pensait à madame de Blionne, et il ne se serait peut-être pas aperçu en sa rêverie que le partisan prenait congé de madame de Preignelay si M. Herbou ne se fût adressé à lui en lui disant :

– Et vous, monsieur, venez demain chez moi. Je vous raconterai une histoire qui prouve la vérité