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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/192

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Tout dormait dans l’hôtellerie, mais y fut bientôt réveillé par les coups frappés à la porte. L’hôtelier, en bonnet de coton, parut à une fenêtre. La vue des torches et des carrosses l’adoucit. Il croyait avoir affaire à quelque voyageur de marque, et il descendit nous ouvrir avec empressement.

» Je ne vous dirai pas sa stupeur à l’aspect de notre mascarade. Il fallut que le maître-laquais lui expliquât gravement que nous étions les Péchés de madame la duchesse de Grigny que nous conduisions à sa dernière demeure. Ce maraud indécent et facétieux ahurit si bien l’aubergiste que, sans rien comprendre à ce qu’on lui débitait, le brave homme prit le parti de nous saluer fort bas du bonnet et de faire entrer en sa cuisine ceux qu’il appelait très poliment : « Messieurs les Péchés. »

» Les chandelles allumées, vous devinez bien qu’on réclama vite à boire : les générosités de monsieur le duc avaient garni toutes les poches d’écus sonnants. Aussi imaginez la rumeur et le tapage. C’était un train à ne pas s’entendre et un spectacle qu’il vaudrait mieux ne pas avoir vu. La grosse Justine vidait son verre, assise sur les genoux de Jacques Ragoire ; Lucie Robine, couchée sur la table, se faisait entonner le sien par Charles Langru.