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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/193

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Les valets eux-mêmes s’étaient fort débraillés et portaient la santé de monsieur le duc. Ils avaient tiré leurs pipes et fumaient du tabac, dont le nuage planait au-dessus de nous. Les cochers des carrosses s’étaient joints à eux et faisaient claquer leurs fouets par-dessus les têtes. Tout cela composait un tableau rendu plus singulier encore par le clinquant de nos costumes, dont tous les voyageurs de passage à l’hôtellerie et importunés dans leurs lits par le vacarme étaient descendus admirer, du seuil de la porte, l’aspect hétéroclite, s’amusant fort de cette bambochade imprévue.

» Enfin, écœuré par l’odeur du vin et du tabac, je sortis dans la cour pour prendre l’air. Les vitres illuminées de l’auberge faisaient courir sur le terrain des lueurs fantastiques, et ce cabaret de village, où se dessinaient, par les carreaux rougis, des ombres bizarres, donnait assez l’idée d’une des salles de l’enfer, où nous figurions assez bien avec nos accoutrements et nos oripeaux diaboliques.

» Ne voulant pas rentrer dans cette fournaise, je me réfugiai dans l’un des carrosses dételés. J’y réfléchissais à ma malencontreuse entreprise, mais je ressentais tout de même un grand désir de la pousser jusqu’au bout et de conduire au repos le cercueil