Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/210

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– N’était-ce pas, en effet, à ma pauvreté et à ma petitesse que je devais l’effroyable regret qui me tourmentait le cœur et qui me faisait couler des larmes au visage ? Ah ! au lieu d’être un simple joueur de flûte en la compagnie de maître Pucelard, que j’eusse été un jeune seigneur de la cour, comme monsieur des Bertonnières, j’aurais eu sans doute de madame la duchesse de Grigny ces faveurs qu’elle accordait moins à son plaisir qu’à sa vengeance. Tout comme un autre, j’eusse pu servir à la rancune qu’elle gardait à monsieur le duc de la mort de ce jeune monsieur de Cérac ! J’ajouterai que ce regret, non d’un moment, mais bien de toute ma vie, que je l’éprouve encore aujourd’hui avec une force et une amertume que le temps n’a pas diminuées, tellement que je me suis mis en tête, pour de bon, d’en éviter tout autre de la même sorte, et je pris, dès que j’en fus capable, mes dispositions pour me trouver en état qu’il en fût désormais ainsi.

» Je me jurai donc à moi-même de ne jamais concevoir pour une femme quelque désir que je ne fisse ce qu’il fallait faire pour le satisfaire, surtout s’il s’y mêlait ce qu’on nomme de l’amour. Je ne me sentais pas en goût de supporter une seconde fois