Aller au contenu

Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/246

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

attendre ici-bas l’heure de Dieu. C’est pour cela que je me suis retiré ici, car avant d’y venir j’ai suivi les voies de ce monde, et, comme j’ai vu qu’elles me conduisaient à courir les plus grands dangers dans l’autre, j’ai pris le parti où vous me voyez et, c’est ainsi, monsieur, que monsieur de La Bégissière a eu l’honneur d’assister à votre premier repas parmi nous et à vos premiers pas dans la pénitence.

Et M. de La Bégissière se mit à rire de toute sa figure rose sous ses cheveux gris.

M. de La Bégissière avait pris du service à quinze ans et n’avait eu d’autre occupation que de se trouver partout où l’on se battait, de sorte qu’à cinquante ans il avait accompli plusieurs fois toutes les actions que comporte la guerre. Or, s’il en est d’utiles et d’héroïques, il n’en manque point non plus de coupables et de mauvaises et c’étaient celles-là qui avaient, à un certain moment, semblé à M. de La Bégissière mériter la peine de changer sa façon de vivre. Touché par la grâce, il se retira à Port-Royal pour y expier le tort d’avoir été un homme. Sa conversion, oubliée maintenant, avait fait jadis quelque bruit. M. de La Bégissière s’était oublié aussi. Il menait une vie obscure et rustique. Quelquefois, cependant, le bel alignement d’un parterre