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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/26

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du Verduron. Madame de Preignelay s’y retirait en été, moins pour y respirer le bon air que pour donner occasion à ses amis de lui prouver, par les quelques lieues de carrosse qu’il fallait faire pour la venir voir, qu’ils étaient capables, pour l’amour d’elle, d’affronter le gros pavé du chemin. Madame de Preignelay était une femme assez spirituelle pour qu’il valût la peine d’avoir de l’esprit à ses yeux, et il était de bon ton qu’elle vous en trouvât. Ce n’était pas pourtant à ce genre de mérite que pouvait prétendre le vieux Maréchal de Serpières, dont M. de Bréot apercevait, à trois pas de lui, le dos courbé et la nuque branlante. Hors la guerre, où il s’était rendu redoutable en tous pays par le train de fourgons qu’il traînait partout après lui et où il entassait indistinctement ce qui lui paraissait à sa convenance, M. le Maréchal de Serpières marquait peu où il se trouvait, sinon par son habit à l’ancienne mode et par une habitude de cracher partout, non seulement à terre sur le carreau, mais en l’air et contre la tapisserie, au hasard, et au risque d’atteindre les gens en pleine figure. Madame de Preignelay passait ce travers au bonhomme sur son crédit à la cour. Aussi M. le Maréchal était-il fort entouré, et, avec M. le prince de Thuines, le personnage le