Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/283

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entrait, avec des gambades et des sauts, une troupe de Sylvains cornus. Leurs longues perruques pendaient sur leurs habits rustiques de velours vert ; soudain, il se faisait comme un repos, et M. de Bréot croyait distinguer un bruissement de feuilles qui se changeait insensiblement en un murmure d’eau. Et M. de Bréot sentait une fraîcheur délicieuse se répandre dans tous ses membres, à la vue d’une forme indécise, pareille à une vapeur incertaine, qui, peu à peu, prenait un aspect humain et devenait une figure de femme de plus en plus distincte. Elle était vêtue d’une robe d’argent qui semblait ruisseler sur elle comme une onde mouvante, et M. de Bréot, haletant et charmé, revoyait danser madame de Blionne, ainsi qu’au soir du Verduron, où elle avait été la Nymphe même des Fontaines.

C’est au sortir de ce songe éveillé que M. de Bréot désirait le plus vivement que quelque chance singulière, quelque subite faveur de la fortune le tirât du commun et le distinguât du vulgaire et qu’il regrettait de n’être demeuré qu’un si petit personnage. À quoi pourtant cela lui eût-il servi ? En aurait-il pu davantage approcher madame de Blionne, puisque l’admiration que sa danse avait excitée et les éloges extrêmes faits de sa grâce et de sa