Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/297

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mes talents, mais il faut bien prendre parfois quelque repos et celui que je rencontre ici me délasse le corps et l’esprit. J’espère cependant en sortir un jour, monsieur, pour de plus grandes entreprises, à moins que le loisir ne me fasse perdre cette finesse qui nous est indispensable et qui a peut-être besoin, pour conserver toute sa vivacité, de ne point cesser d’être mise continuellement à l’épreuve ; car, monsieur, j’ai ici encore moins d’ouvrage que ne se l’imagine ce bon monsieur de Blionne !

M. Hussonnois s’arrêta un instant et, se penchant vers M. de Bréot, lui dit d’un air confidentiel, avec un clin d’yeux et en faisant claquer sa langue :

– Sa femme est jolie, monsieur !

M. de Bréot fut sur le point d’assommer M. Hussonnois avec une des bouteilles vides qui se trouvaient sur la table, mais il se contint.

– Avez-vous remarqué, – continuait M. Hussonnois, – qu’il lui suffit d’avoir une femme coquette pour qu’un homme vive avec elle dans la plus extrême sécurité. Eh bien, ce bon monsieur de Blionne tremble de la peur d’être cocu, et le plus beau est que sa femme est de la vertu la plus éprouvée et la plus solide. Depuis que j’ai pour métier de la suivre et de l’observer, je n’ai pas une fois