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Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/130

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C’est une idée. Le bon compagnon s’y accroche désespérément et il récapitule : étable trop étroite, mauvaise disposition des mangeoires, états intéressants des deux bêtes et, conclusion

si on n’avait pas d’animaux, ça n’arriverait

pas. Tranquillement la femme déclare : « Pour l’ennui que ça vous rapporte », et elle rentre chez elle avec son aspect éternel de princesse lointaine.

« Tu vas faire du feu. On gèle ici. Tu ne vas pas rester ici sans feu, je pense. »

Je hausse les épaules. Il ignore que, dès qu’il a le dos tourné, j’éteins le feu. Je ne veux pas me chauffer en temps de guerre, parce que c’est ridicule. On peut apprendre à ne pas souffrir du froid quand on se porte bien. Je tiens à gagner cette partie avec moi-même : « Je vais la couvrir de laine et lui donner du café. Si elle doit mourir, elle aura contenté toutes ses gourmandises avant… elle mourra ici, de sa belle mort. »

Et le bon compagnon, résigné aux aventures inexplicables, s’en va emportant la triste vision d’une Pierrette à la fois morte et en vie.