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Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/145

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Je rame désespérément et je n’avance pas. Je me tiens au milieu de la rivière et le chemin qui marche passe sous moi sans m’emporter. Malheureusement, quand on n’avance pas, on recule et je me rends compte de l’émoi d’une silhouette noire, là-bas. La femme fantôme est sortie pour voir, par manière de bravade, et elle me croit en péril. Nous sommes seules dans l’immensité des rives. Ah ! la sacrée femelle ! Comme elle arrive à point pour me rendre du courage ! Deux femmes et de la haine, c’est plus qu’il n’en faut pour dompter tous les éléments. Je ne vais pas crever là pour lui donner une émotion qui rendra son gosse épileptique.

Elle crie, elle appelle. Il n’y a ni un pêcheur ni un marinier dans ce paysage d’hiver implacable. On n’a plus un bateau dehors par ce temps de réquisitions des barques disponibles. Moi, la mienne, elle est trouée, elle n’est pas bonne pour le service.

Ça claque, ça fait glou-glou. On jurerait que je rame à l’envers. Ce cochon de bateau boit comme un trou qu’il est… Je n’arriverai