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Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/66

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loi du progrès des civilisations. La même loi qui « aseptise les couteaux de guillotine » ou fabrique les gaz asphyxiants.

Ma première stupeur c’est d’avoir compris que les gens, dans ce désert où il passe rarement de l’humanité, encore moins de la société, imitaient l’accent de la guerre, de la grande vedette, dès son entrée en scène. De très petits soldats, en pantalon de treillis, la figure féroce, gardaient le tunnel de là-bas et le pont du village, des petits soldats belliqueux sautés d’une botte, équipés à la diable et on les entendait dire ; « Victor, vous savez, le Totor ? Eh bien, il a reçu l’ordre de tirer sur celui qui viendrait lui causer ! » — « C’est Julien, de chez Planchot, qui fera la relève cette nuit. » Chose singulière, tout le monde prenait, en un jour, une habitude vieille de quelque mille ans, malgré toutes les raisons qu’on avait de ne pas la connaître, l’endurer. Il faut donc croire que la guerre est une catastrophe naturelle, issue des éléments et indépendante de l’humanité, une sorte d’épidémie, se propageant d’au-