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Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/155

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même, mais plus dangereuse, car elle était plus profonde. J’étais immobile, retenant mon souffle comme si j’avais peur d’éveiller James. On ne peut pas soutenir pendant une seconde un regard fixe, surtout un regard pareil. Je sentis tout mon sang refluer vers mon cœur, qui se prit à battre affreusement.

J’eus l’idée d’ouvrir la fenêtre.

— Non, dit-il, prenez-en votre parti. Vous feriez mieux d’être au piano. Je vous assure que vous y seriez plus en sûreté.

Je savais que la résistance le mettait hors de lui. Je retournai à ma place.

— Que désirez-vous que je vous joue ? dis-je en affectant une parfaite tranquillité.

— Peu importe, Ellen.

Il vint se placer derrière moi, je commençai un morceau classique à grand effet ; un de ces concertos qui font beaucoup de bruit, éblouissent sans aller au cœur.

Dès les premières mesures, il m’arrêta d’un éclat de rire sec.

— Assez, dit-il, assez ; je suis libre de choisir !

— Alors, choisissez.