Aller au contenu

Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

exploiter pour le compte d’un grand industriel ; il se rangeait, cet homme, il faisait du commerce par seul amour du commerce et non plus pour séduire les filles de bonne maison ! Un veuf est bien plus libre, n’est-ce pas ? Il spéculerait à outrance désormais, sans entrave, sans remords, possédant notre argent, et il ferait de son fils un citoyen très révolté, du pays de tous les furieux, de tous les extravagants. Cela, c’était son droit.

Quant à moi, dédaignée, sacrifiée, je me consumerais peu à peu, n’ayant plus que l’espérance de mourir promptement, d’effacer, avec ma personne, tous les souvenirs amers !

Voilà une destinée de femme ! J’étais jeune, on m’avait dite très belle et j’avais été passionnément aimée ! Cette sensation de ne plus être aimée, surtout, m’exaspérait. Mon père s’était lassé de me regarder souffrir, et le petit Henry allait m’oublier dans une nouvelle existence, pleine de joyeux tapages ! Un cri de détresse gonflait mes lèvres et, pourtant, ne s’échappait pas. Oh ! comme j’aurais béni celui qui, à cette heure de crise, se serait assis près de moi, ses bras m’entourant la taille, me di-