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Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/253

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vrier, incapable de voler une femme malade. Surveillez-le tout de même et dites-lui quelques mots affectueux… Voyez-vous, la fierté ne sert à rien avec nous autres, les pauvres.

Il s’arrêta, un rictus méchant à la bouche. Moi, je retenais ma respiration, fascinée par son regard dur, son regard des vilains jours. Le gentleman avait fait place à l’ancien contremaître, au garçon débauché qui avait le mépris des robes de soie des ladies et des manières élégantes du baronnet sir Stow ; ce n’était plus James, mon beau-frère, mais James l’ouvrier, le bâtard, le vagabond, le coureur de tavernes mal famées. Peut-être même avait-il repris son habitude grossière de boire de l’eau-de-vie. Il portait une veste de drap usée aux manches, un pantalon d’une étoffe épaisse et rude, semblable à de la bure, comme en ont les galériens, et ses cheveux, ses abondants cheveux fauves, étaient tout embroussaillés, mais ses yeux conservaient leur éclat superbe et ses dents éblouissaient sous ses lèvres pourpres. Son teint de roux, encore éclairci par la lueur des bougies que Juliette avait allumées dans mes candélabres, présentait l’aspect de la cire.