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Page:Rachilde - La Découverte de l’Amérique, 1919.djvu/193

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du vent et la contraint à s’enfler d’une ivresse folle. La vieille barque saute comme une bonne femme étourdie.

Les cieux lui versent une clarté ardente qui fait bouillonner son gouvernail dans les flots d’où il sort des buées.

En longeant plus vite la grève fleurie d’une espèce de lichens blancs pailletés d’étoiles de givre, on entend sa quille écraser, broyer victorieusement le rude squelette du formidable hiver, et la vieille barque rajeunie, s’incendie à son tour, toute sa coiffe au vent.

Les deux pêcheurs, demeurés graves, sont seuls à ne pas rougir de joie.

Rohild est sombre.

Hereld est pâle.

Le mortel silence de ces contrées rend les hommes farouches. Ils ont du deuil en leurs yeux mélancoliques lassés de la cruelle innocence de la neige ou de la menteuse gaîté de l’océan. Et ils pleurent quelquefois les larmes sanglantes de l’oph-