Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/136

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(Vous avez, Madame, une étrange façon de fabriquer le café !)

J’ai rêvé, cette nuit, que vous ressembliez à une colonne de fumée. Vous partiez du centre du globe et vous touchiez les nuages. Je pouvais voir le monde entier dans sa forme sphérique. Vous, vous gardiez votre visage en haut de la colonne, un visage de cire illuminé par des prunelles de pierres précieuses, et vous vous balanciez de gauche à droite, de droite à gauche, d’un mouvement rythmique absolument intolérable. Je vous criais des choses que vous n’entendiez pas… ou que vous ne vouliez pas entendre. Moi, je demeurais d’une grandeur normale, tout petit à côté de vous, d’une simple taille d’homme, et vous vous balanciez toujours plus vile, à me donner le vertige. La colonne de fumée prenait la consistance de longs voiles de deuil, cela devenait peu à peu votre fameuse robe noire, celle du bal ou celle des soirées de théâtres, alors on apercevait les étoiles qui brillaient à travers, d’un éclat merveilleux. Je me disais : « Elle veut me faire croire que ce sont des astres, mais je sais bien, moi, que cela s’appelle des applications sur tulle, des paillettes très ordinaires. » Et je me démenais pour vous atteindre comme on se démène, hélas ! dans les rêves, en restant immobile. La colonne que vous