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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/235

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et, à mon avis, il n’y a pas pires aventuriers que les aristos. Ils semblent nés pour torturer le pauvre monde par leurs expéditions toujours hasardeuses. Moi, fils de leurs anciens tabellions. n’est-il pas très noble que je demeure la proie de leur fille ? (Il ajouta, la voix sombre :) Madame la marquise, la mariée est décidément trop belle… je ne marche pas, faudra me séduire avant, sans cela je n’aurai jamais le courage de vous donner mon nom.

Elle sourit tristement :

— Que tu es bête, petit, si tu dis ce que tu penses. Qui j’aime est de ma race.

— Oui… l’espace d’un baiser.

— Chéri, cela s’appelle… un croisement.

— Hum ! chez les chiens !

Droits maintenant, l’un devant l’autre et se toisant, leurs ripostes parlaient malgré eux, comme s’ils avaient manié trop nerveusement deux vieilles épées sous prétexte d’en étudier la rouille. Le parchemin était entre eux, déployé, gardant un aspect maussade, et il demeurait hostile à l’un et à l’autre.

— Enfin, dis donc, toi, le descendant des notaires, s’exclama Éliante frappant la table de son poing crispé, elle si douce et si tentatrice, tout à l’heure, tu n’as pas la prétention de me faire expier mes aïeux ? Ce n’est pas un crime