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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/246

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en vous ramenant chez moi, ne serai-je pas obligée de vous tuer pour qu’Éros reçoive votre sang en réparation de l’injure faite à sa prêtresse ! Ce que je respecte le plus en moi, c’est mon dieu ! » « Femme, a-t-il dit en riant, nous ne parlons pas la même langue, moi, je n’ai pas le temps de m’attarder à ces bagatelles qui attachent ou exaspèrent sans profit pour la joie humaine ! » « Mais, ajoutais-je timidement, je vous apprendrai peut-être la joie divine ! » Je vis bien, à sa façon de se fâcher, qu’en effet nous ne parlions pas la même langue. Moi, j’étais folle. Lui était raisonnable.

Cela faisait deux races différentes.

Et je revins chez moi lentement, où je demeurai seule, ayant toujours été seule, malgré ma beauté, mais bien plus seule maintenant, car je sentais que l’envoyé d’Éros ne passerait plus devant ma maison obscure.

Il était trop tard !

…Allons ! Ne lis pas cela sérieusement ! Je ne pleure pas, moi, j’écris des lettres d’amour qui tombent dans l’eau. Tu le sais bien, mon cher petit ami ? Fais donc ce que tu voudras de ta vie, tu es libre, et viens nous voir de temps en temps, il ne faut pas laisser s’attrister les jeunes filles qui espèrent. Marie fera peut-être comme moi, elle se consolera.