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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/279

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objet très gentil à placer sur le coin d’une cheminée quand on lit des romans.

Marie haussa les épaules, et n’y tenant plus, elle s’écria, de sa plus pure voix de gavroche parisien :

— Votre cœur ? Bien ! Elle en a plein une armoire, des cœurs tout chauds. Et elle s’en sert pas, c’est comme ses belles robes qui moisissent ! Je vous dis qu’elle est folle !

— C’est absolument mon avis ! déclara Léon, qui ne put s’empêcher de rire et de l’attirer jusqu’à lui pour l’embrasser chastement, sur le front.

Marie lâcha ses mains, alla dresser des fruits sur un compotier de cristal.

— Nous ferons collation chez elle, dit-elle fébrilement, essayant de dissimuler son trouble ; Mlle Louise en sera ; nous mangerons des tartelettes à la frangipane, nous boirons de la crème de violette, et nous goûterons les pommes d’Anam qui sont mûres, paraît-il ! Est-ce que vous connaissez la pomme d’Anam ? Ça se hume avec des pailles, comme les sorbets. C’est très bon. Mme Louise, c’est la musicienne du bal blanc, une grande blonde, plus blonde que moi ; elle porte des bandeaux à la vierge, et, si elle n’avait pas le nez long, elle serait bien belle ; mais, voilà, j’ai remarqué que toutes les musiciennes avaient le nez long !