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Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/135

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propriété, celle d’endormir leur patient, homme ou animal, pour qu’il souffre moins… puisque aussi bien il faut qu’il le tue ! La femme, déjà folle, ouvrit la fenêtre… Oh ! la belle nuit de printemps, Marie, et quels parfums, venant de la lande en fleurs ! Quelle très douce brise apportant les soupirs des bois et les odeurs sauvages des verdures ! Qui donc peut décrire l’enchantement des nuits bretonnes, peuplées d’elfes dansants et de sirènes qui chantent, au loin, sur la mer ? Mon pays est capable de tout, Marie, même d’ensorceler ceux qui n’ont plus le courage de vivre et de leur offrir la survie en échange de leur amour…

À ce moment du récit, Marie Faneau se tourna irrésistiblement vers le narrateur. Ses beaux yeux tristes s’illuminèrent. Oui, ce breton-là était capable de tout… et même d’un amour passionné. Elle aussi venait d’être frappée de folie, du vertige de l’espoir dont se leurreront toujours ceux qui ont faim de passion. C’était cet homme froid, correct, d’une cruauté si parfaitement mondaine, qui parlait de cette façon frémissante ?

Les autres auditeurs, malgré qu’ils fussent prévenus qu’il s’agissait de la légende, même