Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/223

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et qu’allait-il entendre ! Le souvenir des scènes de la forêt lui remontait au cerveau. La sauvage saison des libertés disparaissait sous les ombres de ce cachot, de cet endroit bénit où des recluses priaient pour les péchés des hommes. Et le pauvre Ragna sentit courir sur ses larges épaules comme des frôlements de chauves-souris.

L’abbesse poussa un profond soupir, souffla et toussa.

— Cette année de malheur je n’ai pu engranger ni vendanger, mon ami, à cause de la grêle et des orages. Si tu viens avec des idées pillardes, tu sauras, dès maintenant, que nos celliers et nos greniers sont vides ! Puis-je te croire sur serment ? Tu es devant Dieu ?

Elle s’assit péniblement sur les marches de l’autel, sa béquille à ses pieds. Ragna tira de sa poitrine des objets qu’il y remit après en avoir ôté un lacet brillant.

— Ceci, dit-il, est un bandeau royal de la maison de Chilpéric. Je jure devant ton Dieu que je ne mens pas.

Leubovère repoussa d’un geste d’horreur le galon doré.

— Je le reconnais… elle en portait de semblables. Assieds-toi ! Je n’oublie pas les devoirs de