Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/227

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membres. Elles passaient sur la route de Poitiers à Tours… elles allaient traînant des voiles, ou du brouillard… Il y en avait une qui était rousse, car sa chevelure lui faisait une couronne, et une autre qui était brune, très belle…

Il s’arrêta, effrayé de son aveu, baissa la tête, inspectant d’un œil anxieux les coins sombres de la chapelle. Plus superstitieux depuis qu’il avait tué, il s’imagina que le Dieu de l’abbesse lui donnait l’ordre de se confesser tout haut :

— A-og ! rugit-il, par nos chiens, je ne vais pas coucher dans cette église qui sent le cadavre !

Leubovère, effrayée à son tour, se leva en soufflant.

— Comment as-tu rencontré ces nonnes… au camp de Chilpéric. Tu m’as donc menti, soldat !

— Je ne suis pas un saint, l’abbesse, répondit rudement Ragna, et je n’ai pas le temps d’écouter tes histoires. Celui qui m’a envoyé m’avait chargé de saluer la fille de Chilpéric. Puisqu’elle l’a oublié, il l’oubliera. Nous sommes des hommes !

Et Ragna, exaspéré en songeant qu’ils volaient des chevaux pendant que les nonnes allaient à pied jusqu’à Tours, se dirigea vers la porte de la chapelle.

— Que Notre Seigneur Jésus-Christ te pardonne