Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/234

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des chevaux, dont quelques-uns boitaient d’une carie au pied.

Il fallait aviser promptement ou la petite armée qu’on avait formée à grand’peine se dissoudrait, fondrait sous les averses comme les récoltes de ces campagnes malheureuses.

Dieu voulait pousser aux enfers ces damnés promis à Satan depuis certaine nuit de pleine lune. À moins que les ténébreuses puissances des forêts eussent le mystérieux dessein de les engloutir tous sous un éboulement de rocs.

— Il faut prendre un parti, décida Ragnacaire un soir. Nous ne pouvons redevenir, toi simple chasseur et moi simple berger. Que ces hommes nous abandonnent et nous serons pendus aux arbres qui nous abritent en ce moment. On fera de nous un exemple pour les voleurs à venir.

Harog hésitait. Il attendait, espérait un retour de ces nonnes qui cherchaient des gens d’armes et se feraient sûrement excommunier en les cherchant. Les murmures des esclaves ne l’intimidaient point.

Aller à Tours serait téméraire. La ville contenait des soldats en plus grand nombre qu’à Poitiers. Demeurer dans les bois en rêvant d’y rencontrer ces femmes égarées n’était que folie furieuse.

Pressé par la troupe tout entière, Harog demanda