Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/254

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— Ce n’est pas Chrodielde que j’aime, c’est Basine.

— Chrodielde est plus belle que moi, Harog.

Il la prit brutalement sous les aisselles et la leva vers lui.

— Tu es pire que les louves dans ta cruauté de femme !

Elle devint rigide comme une statue, la tête droite, les yeux fixes. Il eût juré tenir un ange de cire.

— Ah ! dit-elle, si tu n’étais pas un homme, je t’aimerais, car tu ne me déplais point ; seulement tous les hommes me causent un dégoût pareil à l’envie de rejeter mes aliments. Par grâce, puisque nul ne me sauvera de tes bras, fais vite durant que je fermerai les yeux.

Harog éclata de rire, d’un rire terrible qui avait la résonance d’un éclat de roc tombant sur un bouclier.

— En vérité, dit-il, tu me prends pour un soldat de ton père. Je ne bois point le sang des vierges, moi. Allons-nous-en d’ici, car je préférerais te tuer !

Ils s’éloignèrent précipitamment de la grotte pendant que Méréra, devinant les secrètes férocités fermentant en son maître, filait devant eux comme un trait empenné de plumes blanches.

Le crépuscule rendait la route plus pénible, le