Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/66

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quand la femme se jeta au milieu d’eux pour y chercher le sien, elle s’aperçut qu’il manquait. Ce fut le premier Jésus offert en sacrifice à l’autre. Les trompes reprirent leur vacarme de fin de messe, ce qui dérangea le loup. Lâchant sa petite victime, dont la figure n’était plus qu’un trou rouge pleurant du sang à flots, il se jeta résolument dans le chemin menant au porche de Saint-Hilaire. Des soldats en armes se précipitèrent à sa suite, toutes les femmes qu’on voyait tenant des enfants se barricadèrent dans leur maison, et des marchands qui promenaient sur leurs épaules de grosses guirlandes de charcuterie lâchèrent pied dans un terrible désordre.

Devant le grand portail de Saint-Hilaire, un auvent de planches protégeait à ce moment néfaste l’évêque Marovée, seigneur et maître de la basilique. En haut des marches de pierre, fourrées d’hermine, sa personne rutilait des ors et des gemmes précieuses de son costume de cérémonie. La mitre au front, la crosse au bras, sa dextre bénissant et distribuant les eulogies[1], il donnait ce matin de Noël, à tous les pauvres venus de tous les coins de sa bonne ville épiscopale, des pains

  1. Reste de pain de la messe.