Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/86

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amer ou de buis bénit. La lettre ne contenait que trois lignes, mais elle disait, pour lui seul, toute l’histoire d’une femme qui pleurait.

Ayant reconnu, en le tâtant, que ce mur était plus vieux qu’on ne le croyait, il y planta son couteau, posa une sandale sur ce premier échelon et chercha un trou, là haut, pour y introduire sa main. Peu à peu la lune se dégageait du brouillard. Les grenouilles se taisaient dans les fossés et les rossignols dans les tilleuls. Un grand silence régnait autour du couvent de Radegunde. Harog, retenant sa respiration, monta trois échelons, tout autant qu’il y avait de lignes au message, trois échelons faits de trois blessures entamant la vieillesse des murailles, puis il fut sur leur crête et y rencontra une branche de rosier. Avec soin, en homme habitué aux métiers sauvages, il racla cette branche du dos de son couteau pour lui enlever ses grosses épines, l’empoigna et se pencha de l’autre côté. Alors, il aperçut le sol tout proche de lui, les jardins du couvent formant une terrasse suspendue aux flancs de l’ancienne forteresse romaine. Il se laissa glisser, tomba légèrement, comme en un bond d’animal, demeura un moment à quatre pattes, humant le vent.

Rien ne bougeait, rien ne brillait ; toute la lourde