Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/96

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faut se repentir pour gagner le paradis où chacune de nous retrouvera son rang. Et si nous sommes des pécheresses, nul n’a le droit de nous juger, après Dieu. Es-tu bon chrétien, Harog ?

Harog chercha sa main sous la longue manche flottante. L’ayant perdue il la voulait reconquérir et y mettait des précautions, une ruse de chasseur captant une très menue bête. Lorsqu’il la tint, il eut la pensée torturante qu’il devenait peu à peu le monstre étreignant l’oiseau. Basine le laissait fureter, droite et rigide contre cette muraille inexorable. Elle gardait son aspect de figurine de cire, d’enfant d’ivoire aux prunelles d’escarboucles. Sans voile et sans collier, sa tunique, ouverte carrément sur sa gorge, s’ornait d’un galon d’or, qui mouillait sa peau d’un pâle reflet lunaire ; elle avait toujours la physionomie mystérieuse d’un ange-garçon.

— Je suis chrétien pour te servir, Basine, murmura-t-il d’une voix sourde. N’osant pas s’asseoir aux côtés d’une fille de sang royal, il s’agenouilla dans sa robe.

— Basine, soupira-t-il, n’as-tu pas peur de cette abbesse ?

— Leubovère est presque infirme et n’a souci que de ses membres perclus. Tu sauras plus tard bien des choses qui t’instruiront sur les abbesses.