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Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/144

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vince, un homme fantôme qu’on ne risquait rencontrer nulle part. Mme Pauline Vallier sortait peu, ne fréquentait guère que les théâtres, cherchant à se distraire d’une neurasthénie commençante. Nous nous rencontrâmes dans un de ces endroits publics, puis ce fut le coup de foudre, de part et d’autre, la passion… et je n’ai pas su la garder, parce que je ne la sentais pas à moi entièrement. Il aurait fallu s’expliquer ou abdiquer mon indépendance, mon orgueil d’artiste, en un mot ma liberté à laquelle je tiens énormément… et qui, aujourd’hui, ne me sert à rien ! Je n’ai pas l’habitude de m’intéresser aux femmes en dehors de l’amour… est-ce que par hasard j’ai eu tort pour celle-là ?

J’étouffe sous ces plis lourds qui portent en eux tous mes soupirs, toutes mes anxiétés, les mille et une tortures d’un abandon que je m’imagine injustifié ! Non, je ne céderai pas plus à la tentation de chercher à rejoindre Mme Pauline Vallier que je ne consentirais à me mettre en suiveur, aux trousses de ma petite amie Bouchette. Je sais que Bouchette reviendra parce qu’elle m’aimera. Mme Pauline Vallier ne reviendra pas parce qu’elle ne m’aime plus.

Le vent tourne autour de ma cage de verre, on est en mars et il souffle furieusement pour chasser le vieil hiver qui s’obstine