Aller au contenu

Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/215

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tant aimée, parce que le flacon vide ayant contenu de l’essence précieuse conserve toujours une fugace et enivrante senteur de son parfum, mais j’ai tort de me figurer le retour de l’extase de jadis. Si j’ai eu la même ferveur à la respirer… il est évident qu’elle ne peut plus me sentir, pour employer une expression vulgaire. J’ai dû la froisser cruellement autrefois, et deux années de silence n’ont pas suffi à calmer ses rancunes. On n’est jamais pareils, jamais assez intimes pour tout s’avouer. Elle n’avait pas confiance en moi. Je n’éprouvais même pas le besoin d’avoir confiance en elle. Je n’étais jaloux que sur le moment. Elle me racontait des histoires que je n’écoutais pas ou que je ne saisissais pas dans toutes leurs répercussions. Et puis, il aurait fallu l’intuition, le pressentiment de mon amour futur qui n’est, peut-être, que la fougueuse exaspération de l’absence.

Elle m’a quitté frauduleusement. Je n’ai pas cru à son départ total et, restant rivé à elle par la terrible habitude de la pensée, la cristallisant en mon cerveau comme une matière chimique, inerte aux réactions prévues, je me suis abominablement intoxiqué.

Je réponds sur un ton moins âpre :

— Voyons, Line, comment l’entendez-vous, ce… sur-portrait ?