Page:Radiguet - Souvenirs, promenades et rêveries, 1856.djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

III
Le dimanche de la Quasimodo

Le dimanche de la Quasimodo ramène annuellement depuis des siècles, dans la plupart des villes et des villages de la basse Bretagne, un singulier usage. Cet usage consiste à casser dans les rues, après vêpres, les vases de terre que l’année a mis hors de service. — Toute la poterie de rebut, cruches étoilées, pots à l’eau égueulés, jarres ébréchées, vases de toute nature enfin, pourvu que la matière qui les compose soit fragile, sortent des arrière-cuisines, et sont livrés aux gamins qui les réclament ; ceux-ci, séparés par bandes, inventent alors mille jeux, dont l’invariable résultat est de mettre en pièces, en faisant durer le plaisir le plus longtemps possible, les vases hétéroclites qu’ils sont parvenus à collectionner en ce bienheureux jour. Les hommes, les femmes même ne dédaignent pas de s’associer à cette bizarre récréation du far niente dominical, et les praticiens émérites en relèvent la vulgarité au moyen de raffinements qui ne manquent pas d’intérêt. La Quasimodo, — on nomme ainsi cette Saint-Barthélemy des vieux vases, — s’accomplit de différentes façons. Souvent une douzaine d’individus placés en cercle, et laissant entre eux un certain intervalle, se jettent à la ronde, — nous