Page:Radiguet - Souvenirs, promenades et rêveries, 1856.djvu/18

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pourrions presque ajouter : et à la tête, — des pots de terre d’un poids fort sérieux. La chose serait des plus innocentes si l’on apportait à sa pratique une attention scrupuleuse et une bonne foi désirable ; mais certaines supercheries assez brutales viennent parfois ensanglanter le théâtre de cet exercice. C’est, par exemple, un pot qui, lancé à l’improviste et avec brusquerie, vient rencontrer l’un des partenaires et lui faire cruellement expier la plus passagère distraction ; ou bien encore, c’est un projectile du même genre qui, retombant comme une bombe d’une grande hauteur, se brise entre les bras du joueur courageux qui, présumant trop de son adresse, tente de l’arrêter dans sa chute rapide. Les éclats de grès lui laissent alors aux mains ou au visage une entaille dont pourraient s’inquiéter à bon droit les hommes les moins accessibles à la douleur. — De pareils inconvénients, loin d’ôter de sa faveur au jeu de la Quasimodo, semblent au contraire augmenter son attrait, surtout parmi les rudes habitants des campagnes, où l’on peut constater que les huées de l’assistance n’ont jamais pour objet un excès de témérité punie, mais bien le prudent retrait de corps du joueur qui, se souciant peu de sauvegarder son amour-propre aux dépens de son individu, préfère laisser un vase tombant de haut voler en éclats à ses pieds.

Voilà une scène de la Quasimodo telle que nous avons pu la voir dans un village du Finistère par un joyeux soir de printemps. — Un paysan, un bandeau sur les yeux et armé d’un bâton, a été placé à vingt ou trente pas en face d’une cruche suspendue à hauteur d’homme. Parti à un signal donné, il profite du droit qu’on lui reconnaît de