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Histoire philosophique
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ſes ſectateurs une charité habituelle & univerſelle. La crainte de nuire à leur prochain, c’eſt-à-dire à tous les animaux, à tous les hommes, les occupe continuellement. Le moyen qu’on ſoit ſoldat, quand on peut ſe dire : peut-être que l’éléphant, le cheval que je vais abattre, renferme l’âme de mon père ; peut-être l’ennemi que je vais percer, fut autrefois le chef de ma race ? Ainſi aux Indes, la religion fortifie la lâcheté, née du deſpotiſme & du climat. Les mœurs y ajoutent plus encore.

Dans toutes les régions, le plaiſir de l’amour eſt le premier des plaiſirs ; mais le déſir n’en eſt pas auſſi ardent dans une zone que dans une autre. Tandis que les peuples du Septentrion uſent ſi modérément de ce délicieux préſent de la nature, ceux du Midi s’y livrent avec une fureur qui briſe tous les reſſorts. La politique a quelquefois tourné ce penchant à l’avantage de la ſociété : mais les légiſlateurs de l’Inde paroiſſent n’avoir eu en vue que d’augmenter les funeſtes influences d’un climat brûlant. Les Mogols, derniers conquérans de ces contrées, ont été plus loin. L’amour n’eſt, pour eux, qu’une dé-