Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/410

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qui avoit remplacé Montezuma ſon frère : mais la petite vérole, portée dans ces contrées par un eſclave de Narvaès, l’avoit fait périr ; & lorſque le ſiège commença, c’étoit Guatimoſin qui tenoit les rênes de l’empire.

Les actions de ce jeune prince furent toutes héroïques & toutes prudentes. Le feu de ſes regards, l’élévation de ſes diſcours, l’éclat de ſon courage faiſoient ſur ſes peuples l’impreſſion qu’il déſiroit. Il diſputa le terrein pied â pied ; & jamais il n’en abandonna un pouce qui ne fût jonché des cadavres de ſes ſoldats & teint du ſang de ſes ennemis. Cinquante mille hommes, accourus de toutes les parties de l’empire à la défenſe de leur maître & de leurs dieux, avoient péri par le fer ou par le feu ; la famine faiſoit tous les jours des ravages inexprimables ; des maladies contagieuſes s’étoient jointes à tant de calamités, ſans que ſon âme eût été un inſtant, un ſeul inſtant ébranlée. Les aſſaillans, après cent combats meurtriers & de grandes pertes, étoient parvenus au centre de la place, qu’il ne ſongeoit pas encore à céder. On le fit enfin conſentir à s’éloigner des décombres qui ne pouvoient plus être défendus, pour aller continuer la