Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/172

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Cacus, dont l’estomac postiche, par un mécanisme ingénieux, allait rejeter de la viande crue, et Vulcain, barbouillé de suie, qui faisait fuir toutes les femmes en s’approchant d’elles pour les embrasser. Fasol avait désiré lui-même que la fête de son couronnement eût un caractère de gaieté libre et carnavalesque, pour que le peuple, par ses plaisirs, s’unît à la joie qui le remplissait, — joie trop haute pour être comprise d’une foule.

Nous regardâmes aussi les peintures qui décoraient la place du Rialto ; elles représentaient l’histoire de Prométhée : le Sacrifice à Jupiter, la Découverte et le Vol du Feu, les Vices et les Maux s’échappant de la boîte fatale, enfin la Torture sur la montagne.

— Elle est belle, Pandore, me dit Marietta, tu ne devinerais jamais qui c’est.

— Non.

— Franceschina Morella !

— Pas possible.

— C’est elle. L’a-t-il embellie, hein ? le peintre ! Quand on aime aussi… Il ne s’est pas enlaidi non plus dans Prométhée. Il s’est donné la figure des jours où Franceschina lui fait des scènes de jalousie et où il apprend qu’elle l’a trompé une millième fois de plus.

Nous étouffions, pressées entre les dentelles, les soies et les chairs nues. Tout à coup Marietta éclata de rire.

— Qu’as-tu ? demandai-je.

— Regarde donc les chausses de ce compagnon de la Calza : Elles contiennent un joli compliment. Mais à laquelle de nous s’adresse-t-il ?

— À vous deux, répondit le galant.

— Pourrez-vous attendre jusqu’à ce soir ?

Et elle glissa la main vers son admirateur.