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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 9.djvu/269

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on qu’il serait indifférent, même dans l’intérêt de la religion, de dire à ses ministres : Fuyez l’exemple du XVIIe siècle; l’œuvre de Bossuet et de la majorité des évêques en 1682 est le grand anathème qui pesait sur le sacerdoce français; — aux théologiens et aux philosophes : Pascal et Arnauld ont prêché les doctrines d’une secte hideuse; — à tous les chrétiens : Il faut trembler pour le salut de Nicole et de Sacy; — aux hommes d’état : Le gallicanisme est l’exemple le plus funeste qui ait été donné dans le monde catholique aux peuples et aux rois ; — aux écrivains et aux gens de lettres : Les opinions religieuses de Despréaux et de Racine étaient détestables; — à tous les gens d’esprit enfin : Mme de Sévigné dans sa dévotion suivait des maîtres coupables, comme Arius et Luther, et prenait parti pour un fanatisme dangereux que trop de gens confondent encore avec le christianisme? Le ciel me préserve de supposer qu’on ne croie pas ce qu’on dit, quand on parle ainsi; mais à côté d’une conviction nouvelle n’y a-t-il pas dans quelques réformateurs ultramontains un peu de tactique politique et beaucoup de déclamation?

L’église connaît ses devoirs et elle doit connaître ses intérêts. C’est à elle de savoir s’il lui importe de sortir sans retour de ce large milieu, de cette liberté modérée dont un grand siècle lui avait donné l’exemple, pour se jeter dans une extrémité, au risque de provoquer l’extrémité contraire. Elle seule peut décider quel avantage elle trouverait à se faire nouvelle après un tel passé, étrangère après avoir été nationale. L’état ancien du clergé français comportait des diversités d’opinions, de tendances et de conduites dont il semble qu’il n’avait pas à rougir, et l’on croyait jusqu’ici qu’il n’avait pas lieu de porter envie au clergé d’Espagne ou d’Italie. Aurait-il raison de rechercher avec les églises exotiques jusqu’à l’uniformité de costume et de bréviaire? serait-il jaloux à bon droit d’égaler les clergés de Rome ou de Madrid dans leur empire sur l’esprit du siècle et dans leur influence pour prévenir ou comprimer les explosions des idées de bouleversement, et pour mettre la barque de saint Pierre à l’abri des tempêtes?

La réponse, je le sais, serait celle-ci : L’ancienne église de France n’a pas empêché la révolution française. — Sans doute, ni l’église de Rome la révolution romaine.


VI.

Nous avons trouvé d’excellens écrivains qui, du sein de l’église, ont combattu le traditionalisme en philosophie. Nous désirerions sincèrement que l’orthodoxie opposât des adversaires non moins habiles aux tendances analogues d’une certaine politique ecclésiastique.