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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/218

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détail étonne, ou détonne, on en reconnaît bientôt non seulement la légitimité, mais la convenance. « Pourtant, » s’est-on demandé, « que penseraient et diraient les maîtres d’autrefois, s’ils revenaient au monde, en notre monde musical, de cette édition d’aujourd’hui ? » A quoi l’un de leurs familiers, qui les connaît et qui les aime, un professeur d’histoire de la musique, aurait, dit-on, répondu : « La première surprise passée, ils conviendraient que, dans leur intérêt même et sinon pour accroître leur gloire, au moins pour la renouveler, il y avait quelque chose à faire, et tout justement ce que l’on a fait. »

Très riche déjà, sans être complet encore, le répertoire ainsi publié par M. Salmon abonde en purs chefs-d’œuvre, les uns connus, et d’autres, beaucoup d’autres, comme leurs auteurs mêmes, ignorés. Il n’y a pas dans l’histoire de la musique italienne de plus magnifique figure que celle du grand seigneur et du grand artiste que fut le compositeur des Psaumes et de l’Arianna, Benedetto Marcello, Vénitien. L’un de ses biographes a prétendu qu’il était mieux doué pour « l’élévation de la musique vocale » que pour les « simples symphonies instrumentales, dépourvues d’âme. » Impossible de montrer en moins de mois qu’on ne connaît pas les sonates pour violoncelle et qu’à toute la musique instrumentale on ne connaît rien non plus. D’un Marcello ou d’un Porpora, lequel est le plus grand, cela du moins peut faire doute C’est Porpora que George Sand a choisi, dans le premier volume de Consuelo, comme le type, romanesque et légendaire, des maîtres italiens du temps passé. L’histoire nous en apprend autre chose, et notamment que Haendel, à Londres, trouva dans l’artiste napolitain un émule digne de lui. Pour Haendel encore, et toujours à Londres, d’autres Italiens, comme un Ariosti, comme un Buononcini, furent également des rivaux plus d’une fois heureux. On savait à peu près tout cela. Mais que sait-on d’un Sanmartini, par exemple, si ce n’est, — et combien le savent ? — que les œuvres de ce maître de chapelle milanais se comptent par milliers, et que Gluck, en Italie, à vingt ans, fut son élève ? Enfin, qui donc a fait plus que nommer, ou nommé seulement les Cervetto et les Caporale, et l’Anglais Eccles, et ce Gaillard et ce Roland Marais qui, tous les deux, furent nôtres, et qui viennent, pour ainsi dire à l’improviste, nous faire si grand honneur ? On n’a guère ouï parler d’eux. Mais quelle surprise, et délicieuse, de les entendre chanter ! Oui, leurs œuvres, leurs chefs-d’œuvre à tous, italiens pour la plupart, ne sont que chant. De ce chant, un de nos confrères, italien aussi, donna dernièrement une