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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/358

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« Très Illustre Dame et très chère sœur,

« Je vous ai dit il y a quelque temps, que je vous raconterais en détail la triomphante cérémonie qui a eu lieu à Milan, pour le mariage de la sérénissime reine des Romains et j’ai certainement donné ordre au secrétaire de vous envoyer ce compte rendu. Mais puisque vous m’écrivez qu’il ne vous est jamais parvenu, la faute doit en être imputée au secrétaire et vous devez m’excuser pour cette apparente négligence.

« Le dernier jour du mois passé, le mariage a eu lieu et, en prévision de cette solennité, un portique, a été élevé devant l’église principale de la cité de Milan, avec des colonnes de chaque côté, soutenant un dais violet brodé de colombes. A l’intérieur de l’église, les bas-côtés étaient tendus de brocart jusqu’au chœur, devant lequel on avait élevé un arc de triomphe sur des piliers massifs. Celui-ci était entièrement peint et on y voyait au milieu une figure du duc Francesco à cheval, vêtu de la robe ducale, et, au-dessus, les armes ducales et celles du roi des Romains. Cet arc de triomphe était de forme carrée et orné de tableaux représentant des solennités antiques. Les insignes impériaux et les armes de mon mari étaient placés sur le côté, en face du maitre-autel. Au delà de cet arc, s’élevaient des marches qui conduisaient à une grande estrade élevée devant le maître-autel. A gauche, était une petite tribune, tendue de brocart d’or, où l’on chanta l’Evangile, et à droite, une autre ornée de brocart d’argent, et derrière ces tribunes étaient des sièges rangés avec ordre et drapés pour les conseillers et autres vassaux et les gentilshommes. Aux deux bouts du chœur étaient deux plates-formes élevées, l’une pour les chanteurs, l’autre pour les trompettes et, entre les deux, siégeaient les docteurs en droit et en médecine avec leurs barrettes et leurs manteaux bordés de fourrure, chacun placé selon son rang. L’autel, lui-même, était somptueusement orné des vases d’argent et des images de saints que vous avez vus à la Rocchetta, quand vous êtes venue à Milan.

« La rue conduisant au Dôme était magnifiquement décorée. Les colonnes enguirlandées de lierre se succédaient sur tout le parcours, depuis les remparts du Gastello jusqu’au bout de la place et, entre les colonnes, des guirlandes de rameaux portaient des cartouches avec des emblèmes antiques et des boucliers