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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/797

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M. Léon Bourgeois fut désigné comme délégué de la France pour la Société des Nations à la Conférence de la Paix. Mais il se trouva en présence d’un projet dont les grandes lignes étaient arrêtées et qui combinait les vues anglaises et américaines. Son effort principal se porta sur un amendement soumettant au contrôle de la Société des Nations les armements des Puissances. Cet amendement fut rejeté par la Conférence de la Paix. Il sera repris par le gouvernement français devant la Société des Nations elle-même.


L’Allemagne et la Société des Nations. — L’examen des différents points de vue des gouvernements alliés ne prendra tout son intérêt que si on les compare au point de vue allemand. Car la véritable pacification ne peut naître que d’un accord des intérêts, des sentiments et des convictions. Le président Wilson et les publicistes anglais ont répété avec raison que la Société des Nations n’avait de chances de succès que si tous les peuples se trouvaient, un jour, réunis en une force unique. Seule, cette force serait réellement supérieure à « l’équilibre des Puissances » ou au « concert européen » auxquels on paraît avoir définitivement renoncé.

Cependant, si l’on voyait s’introduire, dans la Société des Nations, un esprit de discorde, d’intrigue et de trouble, mieux vaudrait, assurément, délaisser une nouveauté devenue, à son tour, dangereuse, et en revenir aux anciennes pratiques, si désuètes soient-elles : le péristyle s’écroulerait et interdirait l’accès à l’édifice lui-même, c’est-à-dire à la Paix.

L’Allemagne, depuis qu’elle est battue, est prise d’un ardent désir de faire partie de la Société des Nations. Quant à ses véritables sentiments, nous n’avons, pour nous renseigner à leur sujet, qu’un document vraiment digne d’attention : c’est le Mémoire émanant du ministre des Finances actuel, M. Erzberger lui-même. Ce mémoire a été publié le 21 septembre 1918. Quelles que soient les modifications qui aient pu se produire en une pensée aussi versatile, il est deux points, dans ce mémoire, qui, sous le couvert d’une adhésion générale au principe de la Société des Nations, caractérisent fortement les dispositions de l’Allemagne.

Erzberger entend, d’abord, que la Société des Nations réalise un accord économique avec clause de la nation la plus favorisée