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du front, le sourcil contrario ; le reste de la physionomie est tout intelligence ; mais la volonté y a mis une marque qui, à Certaines heures, couvre tout. Elle est capable de tout à ces heures où elle se bande et, par exemple, d’imposer à lui-même un travail surhumain, une activité inlassable, des efforts prodigieux. Il la fait pas-er jusque dans sa parole et, de l’interlocuteur d’abord récalcitrant, il obtient tout parce qu’il veut.

La conscience parait aussi forte : elle l’ait le chef, j’entends la conscience exacte des responsabilités de sa charge. « Ce sont les généraux et non pas les soldats qui gagnent les batailles, a écrit le colonel Foch... un général battu est un chef disqualifié. » Si le chef est conscient de cette vérité, il lui faut accepter avec l’honneur toute la charge. « Ces décisions, il faut les prendre avant qu’elles soient imposées, ces responsabilités, il faut aller au-devant d’elles... » Ce qu’il professe, il le pratique : il est de ces « natures supérieures avides de responsabilités » dont il a parlé ailleurs. Le chef prend ses responsabilités ; il ne se croit point tenu pour cela de se murer dans ses plans. « Commander n’a jamais voulu dire être mystérieux, mais bien communiquer au moins aux exécutants en son ordre immédiat la pensée qui anime la direction. » Aussi bien entend-il ne se point enfermer dans un cénacle. L’action personnelle lui a toujours paru la condition essentielle du commandement, il y est revenu dix fois. « L’action personnelle qui, pour se manifester, réclame le tempérament du chef (don de la nature), l’aptitude au commandement, la puissance d’entrainement que l’école ne fournit pas, » il l’a plus qu’aucun chef mise en pratique. Depuis 1914, il a toujours donné et, pendant la bataille de sept mois qui se va dérouler, il donnera à ses subordonnés l’impression de sa présence réelle derrière eux. « Que dirait-on, a-t-il encore écrit, d’un chef d’orchestre qui, après avoir indiqué le morceau à jouer se tiendrait au loin derrière son orchestre, abandonnant aux exécutants le soin de partir et de s’accorder quand et comment ils l’entendraient ? « Il veut que ses exécutants aient les yeux fixés sur le chef d’orchestre ; il veut que leur regard soit confiant, bienveillant, cordial. Il fait tenir la discipline non dans une soumission aux vues, mais dans une cordiale entente : « Qu’on entre franchement dans la pensée, dans les vues du chef qui a ordonné et qu’on prenne tous les moyens humainement praticables pour lui donner