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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/855

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La première devait s’efforcer d’attaquer le plus tôt possible dans la région de Montdidier, en vue d’éloigner l’ennemi de la voie ferrée Saint-Just-Breteuil-Amiens ; la seconde, maintenant une attitude défensive sur le front Albert-Arras, attaquerait de même à cheval sur la Somme, de la Luce à l’Ancre, en vue d’éloigner les Allemands du nœud de chemin de fer d’Amiens. Il était peu discutable « qu’une offensive sur et au Sud de la Somme était la meilleure parade à l’offensive de l’ennemi possible au Nord de cette rivière. »

Supposant alors que les Allemands poursuivraient avant peu leur dessein en direction d’Abbeville, il redoutait en effet une attaque entre Amiens et Arras. Et tout en attirant l’attention du maréchal Haig sur cette éventualité, il continuait à nourrir le projet de prévenir l’événement en attaquant lui-même au Sud. Pour ce, il s’assurait de nouvelles forces. Dès le 28 mars, l’état-major de la 5e armée (général Micheler) avait été retiré du front de Reims que s’étaient partagé les 6e et 4e armées et porté à Méru dans l’Oise où il pouvait devenir le noyau d’une armée nouvelle. Par ailleurs, un autre état-major d’armée, — l’un des plus remarquables sous l’un de nos chefs les plus éminents, — arrivait de bien plus loin : c’était celui de la 10e armée. Ayant quitté Vicence le 31 mars, le général Maistre débarquait à Gournay-en-Bray le 3 avril, à la disposition directe du général Foch. Celui-ci le destinait à former en arrière du front anglais, avec ses divisions, une de ces masses de manœuvre dont l’intervention pourrait immédiatement se produire. Car tous les jours davantage, le général Foch entendait que la conséquence de l’unification du commandement fût la fusion des forces alliées. En toutes circonstances, il recommandait une étroite liaison, mais elle ne pouvait suffire à le contenter.

Son autorité venait d’être confirmée, précisée et augmentée. Sans recevoir encore le titre de général en chef (il ne lui sera accordé que le 14 avril), il se voyait confié non plus un rôle de simple « coordination, » mais la « direction stratégique des opérations militaires. » Sans doute, la conférence de Beauvais du 3 avril laissait-elle à chacun des généraux en chef anglais, français et américain, « dans sa plénitude la conduite tactique de son armée » et « le droit d’en appeler à son gouvernement si, dans son opinion, son armée se trouvait mise en danger