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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/921

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VERSAILLES EN 1870-1871

La ville de Louis XIV a eu à notre époque ce privilège de voir se dérouler dans ses murs les grands événements qui, à quarante-huit années de distance, ont ouvert et fermé une période de l’histoire de l’Europe. Le 28 juin dernier, les héritiers de l’Empire allemand ont contresigné son arrêt de mort dans cette même Galerie des Glaces où il avait été proclamé. Evoquer, à propos de cette cérémonie symbolique, le tableau que des témoignages allemands nous présentent de la vie de Versailles pendant l’occupation de 1870-1871 [1], ce n’est pas seulement poursuivre une satisfaction patriotique et un facile effet de contraste entre nos tristesses d’autrefois et nos revanches d’aujourd’hui. C’est aussi rechercher si, entre les unes et les autres, il n’existe pas un autre lien que la succession chronologique, et si les conditions dans lesquelles les Hohenzollern ont pris la couronne impériale ne peuvent servir à expliquer comment ils n’ont pas pu la conserver ; c’est demander à l’histoire des dernières années, avec un de ses spectacles les plus saisissants, la plus instructive de ses leçons.


I

Ce fut la journée du 19 septembre 1870 qui apporta la première aux Versaillais les images de la guerre et les douleurs de l’invasion. Au bruit du canon du combat de Châtillon, livré à leurs portes, de longues colonnes de troupes, suivies d’interminables

  1. Voir notamment Versailles und die Hauptquartiere, par le peintre Anton von Werner (dans l’ouvrage collectif : Krieg und Sieg, Berlin, 1895). Cf. le Comte de Bismarck et sa suite pendant la Guerre de France, par Moritz Busch (Trad. française, 1879) ; Briefe des Grafen Paul Halzfeldt an seiner Frau (Leipzig, 1907) et von Pfeil, Vor Vierzig Jahren (Schweidnitz, 1910).