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Page:Sand - Francia.djvu/206

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n’as pas de ça (Moynet frappait sur sa poitrine) ! Tu n’as ni cœur, ni âme ! Une chiffe, quoi ! Un oiseau qui ne veut pas de nid, et qui va comme le vent le pousse. Tu as écouté des pas grand’chose, tu as méprisé tes pareils, tu aurais pu épouser Antoine, tu le pourrais peut-être encore ! Mais non, tu te crois d’une plus belle espèce que ça. On a eu une mère qui pirouettait sur les planches, devant les Cosaques, et on dit : Je suis artiste. On se donne à un perruquier parce qu’il est artiste, lui aussi ! Tiens, tout ce qui sort du théâtre et tout ce qui y rentre, c’est des vagabonds et des ambitieux ! On s’habille en princes et en princesses, et on rêve d’être des rois et des empereurs. J’ai vu ça à Moscou, moi ; il y avait des comparses de théâtre qui buvaient bien la goutte avec nous, mais qui n’auraient jamais pris un fusil pour se battre. Tu as été élevée dans ce monde-là, et tu t’en ressens : tu seras toujours celle qui ne fait rien d’utile et qui compte sur les autres pour l’entretenir.

— Mon papa Moynet, dit Francia, humiliée et