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directoire (1798).

surtout de ne pas rester dans la rade d’Aboukir, car il valait mieux rencontrer l’ennemi à la voile, que de le recevoir à l’ancre. Une vive discussion s’était élevée sur la question de savoir si on pouvait faire entrer dans le port d’Alexandrie les vaisseaux de 80 et de 120 canons. Il n’y avait pas de doute pour les autres ; mais pour les deux de 80 et pour celui de 120, il fallait un allégement qui leur fit gagner trois pieds d’eau. Pour cela il était nécessaire de les désarmer ou de construire des demi-chameaux. L’amiral Brueys ne voulut pas faire entrer son escadre dans le port à cette condition. Il pensait qu’obligé à de pareilles précautions pour ses trois vaisseaux les plus forts, il ne pourrait jamais sortir du port en présence de l’ennemi, et qu’il pourrait ainsi être bloqué par une escadre très-inférieure en force ; il se décida à partir pour Corfou. Mais étant fort attaché au général Bonaparte, il ne voulait pas mettre à la voile sans avoir des nouvelles de son entrée au Caire et de son établissement en Égypte. Le temps qu’il employa, soit à faire sonder les passes d’Alexandrie, soit à attendre des nouvelles du Caire, le perdit, et amena un des plus funestes événemens de la révolution et l’un de ceux qui, à cette époque, ont le plus influé sur les destinées du monde.

L’amiral Brueys s’était embossé dans la rade d’Aboukir. Cette rade est un demi-cercle très-régulier.