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fermés, avec ceux de l’âme. Cette communion avec le Tout supprime les rapports et, comme l’indique le verbe μύεῖν, cette union est mystique, non symbolique.

Le poète symboliste est un mystique. Le mode de perception du mystique et du symboliste est le même[1].

Et pourtant, à y regarder de très près, on s’aperçoit que le mot symboliste, appliqué aux poètes dont je parle, est bien choisi. Car, tant que le mystique garde en lui, en sa conscience spontanée, son intuition, tout va bien. Mais veut-il l’exprimer, l’objectiver, la réfléchir dans le miroir de l’intelligence discursive pour en faire participer ses concitoyens, alors tout change. Afin que vous puissiez comprendre le trouble qui m’émeut, le délire céleste, la θεῖα μοῖρα dont parle Platon dans le Phèdre, qui m’a envahi tout à l’heure au fond du bois, du bois que je sentais avec tout mon être, — mente cordis, — du bois que j’ai

  1. Il y aurait lieu d’insister sur ce point. Je le ferais volontiers si j’offrais ici autre chose qu’un sommaire de questions à traiter ultérieurement. Qu’on veuille bien ne pas oublier que cette étude n’est que la très brève condensation de quelques idées, qui trouveront plus tard leur développement normal dans l’exposé d’une théorie métaphysique sur l’Idée symbolique et la Poésie contemporaine. Ces Prolégomènes résument tout un livre futur.