Page:Wiele - Ame blanche.djvu/128

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
126
ÂME BLANCHE

terre que nous possédions à Vichte-Sainte-Marie, en Flandre, disant au docteur, sur le pas de la porte, au moment de le quitter, après une conversation où nos intérêts avaient été débattus entre eux :

— Pour le bien de ma sœur et de la petite, gardons-leur cette parcelle de champs, cette ferme des Tilleuls, à Vichte ; cela ne rapporte guère, je le sais. Mais c’est sûr, et je ne suis pas follement épris du papier, moi, je vous l’avoue. Les si brillantes opérations de Bourse dont vous me parliez tantôt me font peur.

Cela avait été formulé très discrètement, presque timidement, par un homme qui professait à l’égard de M. Veydt la vénération générale ; mais, j’en avais conclu qu’il pouvait n’être pas mauvais d’avoir un coin de terre en Flandre plutôt que beaucoup d’argent en papier, dans son tiroir. Sans bien définir mon sentiment, qui restait enfantin, cette rage de transformer la propriété foncière en valeurs de banque me paraissait un peu excessive.

Jacques, lui, ne s’arrêtait point à ces considérations-là : il avait la nostalgie de ses plaines flamandes, et il en voulait surtout au docteur de l’avoir éloigné d’elles. Cependant, la façon dont il jugeait son tuteur me faisait voir ce dernier sous un jour nouveau et, peu à peu, l’aveugle respect que Mme et Mlle Veydt m’avaient inculqué à l’endroit de celui-ci diminuait, s’éclairait