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ÂME BLANCHE

dant que rien, jamais, eût fixé d’une manière positive ce que serait, dans cet avenir que nous devions partager, nos situations l’un vis-à-vis de l’autre. Une sympathie profonde, une mystérieuse et complète entente unissaient nos pensées et nous étions, tous deux, si neufs et si ingénus que l’idée qu’il pût régner dans ce sentiment d’ardente fraternité, éprouvé par deux adolescents, qui n’étaient point le frère et la sœur, une anomalie quelconque ne nous avait jamais effleurés.

Ma tante Hélène, en me conseillant un jour de rompre toute correspondance familière avec Jacques Holstein, m’étonna singulièrement.

— Pourquoi voulez-vous que nous cessions de nous écrire ? lui demandais-je presque insurgée, tellement, de me conformer à cet avis, me semblait pénible.

Et quand elle eut répondu d’un air péremptoire :

— Parce que ce n’est pas convenable…, vous êtes aujourd’hui trop grands, tous les deux, Pour garder ensemble ce ton d’intimité…

Je restai interdite ; j’avais rougi jusqu’aux cheveux et j’eus, aussitôt, j’eus, pour la première fois, le sentiment des obligations de mon âge véritable et de n’être plus une enfant.

— C’est bien, ma tante, vous avez raison ; je n’écrirai plus à Jacques, dis-je subitement vaincue, dans une prescience qui devançait le